Provinces-Unies de Belgique?

Adrien Foucart | 25 Nov 2020
2xRien - un blog

Le système électoral américain est, pour être poli, archaïque. Chaque fois qu’une de leurs élections menace de plonger le monde dans le chaos pour quatre ans, je me retrouve à jouer au “et si…” : et si la Belgique avait un système similaire ?

Il serait complètement idiot d’essayer de jouer avec les résultats électoraux belges dans un système américain et d’en tirer une quelconque conclusion : les partis, l’électorat, les médias traiteraient l’élection de manière tellement différente que les résultats seraient drastiquement changés. Idiot, mais moi je trouve ça un peu rigolo quand même, donc allons-y.

Voyons d’abord les caractéristiques principales du système électoral américain.

  • Chaque État (et Washington DC) tient le même jour une élection.
  • Chaque État dispose d’un nombre de “grands électeurs” égal au nombre de représentants de cet état au Congrès, soit deux sénateurs et un nombre de représentants à la chambre qui dépend de la population de l’État. Le District de Columbia (Washington DC) dispose de 3 grand électeurs, même s’ils n’ont pas de représentants au Congrès.
  • Chaque État* donne l’ensemble des voix de ses “grands électeurs” au candidat qui y a obtenu le plus de voix.

* Sauf le Maine et le Nebraska, mais honnêtement on ne va pas commencer à s’embourber dans toutes les subtilités et absurdités du système sinon on ne s’en sortira jamais !

Comment pourrait-on traduire ce système à la Belgique ? Je vais faire au plus simple :

  • Chaque Province (et Bruxelles-Capitale) tient le même jour une élection.
  • Chaque Province (et Bruxelles-Capitale) dispose d’un nombre de grands électeurs égal au nombre de représentants à la Chambre. Le Sénat ne compte pas, parce que les délégués ne sont pas liés aux provinces, et que “le Sénat ne compte pas”, c’est un peu l’idée générale en Belgique. Vous allez me dire : les provinces aussi. C’est pas faux. Tant pis, ceci n’est pas un travail académique.
  • Chaque Province (et Bruxelles) donne l’ensemble des voix de ses grands électeurs au ou à la président·e du parti qui y a obtenu le plus de voix.

Il y a 150 sièges à la Chambre. Le but du jeu est donc d’obtenir 76 voix auprès des grands électeurs. À quoi aurait ressemblé la carte électorale après les élections législatives de 2019, si tout le monde avait bizarrement voté pareil malgré ce système complètement différent ?

Commençons par les grands perdants de ces élections : tous les partis néerlandophones qui ne sont pas la N-VA. Bart De Wever est en tête dans toute la Flandre, et rafle 87 grands électeurs pour immédiatement devenir Premier Ministre. Aucun suspense, les médias peuvent annoncer le vainqueur dès la fermeture des bureaux de vote. Aucun autre parti flamand n’apparaît sur la carte.

Autre perdant de ce système : le MR, avec 9 grands électeurs (contre 14 sièges réellement gagnés aux élections). Il n’est en tête que dans les deux provinces les moins peuplées de Belgique, le Brabant Wallon et le Luxembourg, où leurs 200 voix d’avances sur le cdH leur permet tout de même de rafler les électeurs de la province. Le cdH, tout comme le PTB et DéFI, disparaissent de la circulation.

Ecolo s’en sort mieux en nombre de grands électeurs qu’en nombre de sièges effectivement gagnés dans le système belge. Avec 8.000 voix d’avance à Bruxelles, ils obtiennent 15 grands électeurs et devient le troisième parti politique du pays. Le PS conserve le “mur rouge” du sillon Sambre-et-Meuse, et obtient 39 voix.

Toutes ces considérations de “nombre de siège” contre “nombre de grands électeurs” étant bien sûr sans impact : dans le système américain, seul le gagnant compte. Quoique, si on remonte suffisamment loin dans le temps, leur système originel voulait que le second devienne vice-président, ce qui nous permettrait de voir aux commandes le tandem De Wever – Di Rupo.

Tout cet exercice était parfaitement inutile. J’assume !

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