Les médias et les politiciens européens ont réalisés un grand exploit, qui mérite toute notre admiration. Ils ont réussit à prendre une crise majeure ; une crise qui touche des millions de personnes en Syrie, en Irak, en Afghanistan ; une crise qui a fait des centaines de milliers de morts, qui a forcé des populations entières à quitter leur vie et leur foyer… et à faire de nous les victimes.
Nous, pauvres européens qui allons devoir, horreur ultime, peut-être mettre temporairement la main à la poche pour sortir quelques euros supplémentaires par personne pour accueillir les réfugiés.
Nous, pauvres européens forcés de regarder la misère en face, et de côtoyer des gens différents.
Nous, pauvres européens, qui risquons de voir quelques mosquées supplémentaires construites sur nos terres chrétiennes.
À entendre nos médias et nos politiciens, on pourrait penser que la cible principale du Daesh, c’est nous. Que ces réfugiés sont un moyen trouvé par l’État Islamique pour envahir et affaiblir l’Europe. Parce qu’il est apparemment trop dur d’imaginer que tout ça, toute cette crise, puisse ne pas être centrée autour du monde occidental. D’admettre que nous ne sommes que des personnages secondaires de la tragique histoire qui se déroule au Proche-Orient et au Moyen-Orient.
Nous devons apparemment nous convaincre que nous vivons un grand conflit entre le monde occidental et les terroristes islamistes. La “Guerre contre le Terrorisme” des États-Unis et de ses alliés européens contre Al Qaeda, Boko Haram, l’État Islamique, et toute ces organisations beaucoup trop compliquées à différencier les unes des autres. Ce grand conflit, cependant, n’existe que dans la tête des occidentaux. Pour le Daesh, pour Al Qaeda, l’occident n’est qu’un adversaire symbolique, un moyen de rallier les populations locales survolées en permanence par des drones américains qui semblent frapper autant les civils que les leaders terroristes.
Le réel adversaire du Daesh et d’Al Qaeda, c’est l’Islam. La majorité de leurs victimes, des musulmans. La lutte qui se déroule est avant tout une lutte entre la vision déformée de l’Islam défendue par l’Etat Islamique, et celle des autres, ceux qui restent pour se battre, ceux qui fuient, ceux qui essaient de survivre au milieu du chaos, ceux qu’on se permet de juger depuis notre position bien confortable en leur disant qu’ils ne “condamnent pas assez” l’islamisme radical. Ceux qu’on laisse mourir dans la méditerranée, qu’on laisse macérer dans des camps au pieds des clôtures érigées à la hâte, et à qui on enseigne, une fois arrivé sur notre territoire, les délices des procédures administratives locales au bout desquelles on leur informera que leur pays en guerre n’est pas si dangereux que ça, et qu’ils pourraient quand même y retourner plutôt que de déranger les pauvres belges qui veulent faire leur jogging en paix sans voir des gens bronzés.